lundi 14 février 2011

III. La pérennité du mouvement et l'héritage

1. Perception du mouvement 

 Ce développement soudain de « jeunes barbus fleuris » suscita des avis très partagés au sein de l'opinion publique; en effet, si certains admiraient leur audace et leur « courage » d'affirmer leurs opinions, de revendiquer leur façon de voir le monde, d'autres au contraire les percevaient comme des marginaux, dérangeants, des drogués incapables. 

La partie contre

Ce sont les bourgeois, les politiciens de droite, les religieux pratiquants (ect,,) qui avaient la plus mauvaise opinion de ce mouvement: l'opinion de ces marginaux s'opposait totalement aux leurs, ils ne les considéraient que comme des « jeunes voyous dangereux, sans foi ni loi, saoules et drogués », une « source de problèmes politiques ».
Mais ce qui dérangeait le plus c'était le fait qu'un bon nombre d'entre eux se « permettaient » d'élever des enfants et de vivre tous ensemble en communauté. On les disait mal soignés, pervertis, mal éduqués avec une mauvaise alimentation. John Rothchild et Susan Wolf en feront la démonstration dans leur livre intitulé « Les enfants de la contre-culture ». En voici un passage:

«En général, les enfants communautaires jouissent d'une liberté physique qui remplirait de crainte une mère de la ville.

Chaque groupe d'âge va au-delà des limites du bon-sens. Au ranch, on laissait les petits en face de tas de vieux outils et d'objets dangereux; des enfants de sept et huit ans restaient seuls dans les maisons, au Last Resort, avec des couteaux tranchants, des poêles et des scies mécaniques. Au Centre d'Études du Taos, on laissait les adolescents avec la drogue, les fusils, le sexe; on permettait à des gosses de douze ans de s'installer au bord de la route pour faire de l'auto-stop avec des inconnus. Tout ce qui n'est pas arrivé directement à ces enfants, ils l'ont probablement vu arriver à d'autres. Même à la Ferme, où les enfants jouissaient d'une liberté moins totale, ils pouvaient voir leurs parents avoir des rapports sexuels.

Dans d'autres communautés, les enfants étaient témoins de querelles sans fin et de disputes conjugales, de sessions de drogue, parfois d'orgies, d'épidémies, et de frasques familiales de toutes sortes. Les parents ne faisaient aucun effort pour amortir les chocs ou protéger les enfants des dangers et des fortes expériences émotionnelles.»

 La partie pour

Malgré toute ce dénigrement de la part des intégristes, certains avaient un avis plus favorable: ils trouvaient ces jeunes sympathiques et les enviaient. Parmi ceux qui les appréciaient sans en faire partie, une part se trouvaient trop vieux pour se permettre de les rejoindre, d'autres trop jeunes pour entrer dans ce mode de vie, et une dernière partie ne voulait pas chambouler ou changer quoi que ce soit dans leur train-train quotidien (ou encore d'être mal perçus par leur entourage et leurs proches).
Un bon nombre d'écrivains manifestaient leur sympathie à l'égard de ces jeunes décalés, comme François Mauriac, dans son livre « Bloc-notes »:

    «(..)Certes je ne m'étonne pas, je ne m'indigne pas: ces garçons réagissent, à l'entrée de la vie, avec le souci dominant d'un avenir sans débouché où ils ont la hantise de ne pas trouver leur place. Moi, dans mon « illustre retraite », pour parler comme Rimbaud, ma copie remise, je me distrais en attendant la fin, avec des lectures d'histoire. Comment ressentirais-je ce qu'ils ressentent ? Je m'y efforce pourtant. Je suis tout de même avec eux.(...)»

On les voyait comme des gens libres, libres de s'affirmer, de revendiquer leurs opinions, d'aller où bon leur semble sans se soucier du qu'en dira-t-on ou des règles.

La partie mitigée

Au milieu de cette division de l'opinion générale, une partie de la population n'avait pas de réel avis sur le sujet, restaient passifs, ou les observaient simplement. Malgré le fait que les médias donnèrent beaucoup leur point de vue, une majeure partie ne fit que transmettre les informations, décrire le mouvement, et non de prendre un quelconque parti, juste de rester neutres.
Un exemple de cet avis mitigé: la journaliste Danièle Rozenberg dans un de ses articles où l'on ne se rend pas vraiment compte de l'opinion de l'auteur:

«Eté 1969. L'affluence des jeunes étrangers à Ibiza atteint des records absolus. Depuis deux-trois ans déjà, les hippies ont envahi le quartier du port, les ruelles de la vieille ville, les plages et la campagne environnante. Cheveux longs, barbus, vêtus de tenues multicolores d'inspiration indienne, ils s'étalent aux terrasses des cafés dans l'attente du bateau qui les conduira à l'île voisine de Formentera. Ils jouent de la flûte, lézardent au soleil, se baignent puis, le soir venu, s'assemblent au clair de lune pour bivouaquer, faire de la musique, «voyager» à l'herbe ou à l'acide Ces visiteurs d'un genre nouveau qui sourient aux passants, déconcertent et fascinent tous ceux qui les approchent. Halte sur la route du Maroc et de l'Orient avant le «plongeon», ou vacances-évasion, la découverte d'Ibiza est la préfiguration d'une autre vie possible.» 

Malgré les dire d'un bon nombre de personnes, qui affirmaient que les hippies n'avaient qu'une mauvaise réputation, on peut voir ici que c'est totalement faux, puisque la population était très partagée sur cet avis.

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